Laure de Gennes: «L’entrepreneuriat? Beaucoup de sacrifices et une aventure humaine»

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Veröffentlicht am 29 Juli in Le temps

Laure de Gennes, cofondatrice du site eboutic, estime qu’il faut du dynamisme et de l’inconscience pour créer une société. L’entrepreneuriat est devenu une passion pour la dirigeante.

Quand elle a vu son père devenir entrepreneur, à l’âge 45 ans, pour se lancer dans le packaging, Laure de Gennes ne pensait pas suivre ses traces. Bien au contraire. «C’est un tel investissement humain», fait remarquer la cofondatrice du site internet Eboutic, qui a grandi à Paris. Et pourtant, c’est la voie qu’elle a, elle aussi, choisie, tout comme son frère d’ailleurs. La fibre entrepreneuriale serait-elle familiale? «Difficile d’y répondre. Par contre, ce qu’il faut, c’est beaucoup d’optimisme, du dynamisme, un peu d’inconscience et du leadership pour chercher des fonds et motiver les collaborateurs, répond-elle. Mais dans tous les cas, ce n’est pas l’appât du gain qui doit inciter à créer une entreprise.»

Après des études de commerce et un parcours de douze ans dans le domaine des télécommunications chez BT et SFR en France, Laure de Gennes décide de suivre son mari lorsqu’il décroche un emploi chez un horloger en Suisse. Elle est à son tour embauchée chez Orange. Mais la stimulation fait défaut. C’est alors, en discutant avec un ami, Arthur Dauchez, l’un des cofondateurs de Visiowave, une start-up dans la vidéo surveillance, rachetée par le géant américain General Electric, que l’idée de créer une entreprise dans l’e-commerce fait surface. «Nous voulions reprendre le modèle français du site Vente-privee.com et l’appliquer sur le marché suisse. En 2007, il n’existait pour ainsi dire aucun site marchand sur Internet proposant des produits de marque à prix cassé», explique-t-elle. Elle a le déclic. C’est sans appréhension ni états d’âmes qu’elle quitte son emploi chez Orange pour cofonder Eboutic.
Quatre ans après le lancement d’Eboutic, la start-up recherche des fonds externes pour développer la logistique de l’entreprise. Le groupe Maus Frères, propriétaire notamment des magasins Manor, reprend une part du capital, à hauteur de 70%. Les fondateurs perdent alors une partie de leur indépendance. «Nous travaillons en partenariat, mais continuons de gérer la société de manière autonome au quotidien, précise-t-elle. Et le fait d’avoir comme partenaire le groupe Maus Frères est un gage de pérennité.»

Aujourd’hui, l’entreprise emploie cinquante collaborateurs à Lausanne et à Monthey et réalise plusieurs dizaines de millions de francs de chiffre d’affaires. La rentabilité serait aussi au rendez-vous. Chaque matin, le site propose de nouveaux produits de marque pendant une période limitée, avec un rabais oscillant entre 20% et 80%. Il dénombre 1,4 million de membres, dont 70% en Suisse alémanique. L’entreprise ne possède aucun stock. Le fournisseur expédie la marchandise uniquement lorsqu’une commande a été passée. «Chaque jour, nous vendons plusieurs milliers d’articles», précise Laure de Gennes, dont la société s’est également lancée dans les ventes de voyages et les loisirs.

Depuis 2007, de nouveaux acteurs sont apparus sur le marché, avec des concepts plus ou moins similaires. «Le problème ne vient pas des concurrents, mais de l’arrivée sur le marché suisse de grandes sociétés, type Zalando. Ces entreprises créent une pression sur les coûts de marketing d’environ 25% par an. Il faut sans cesse être plus innovant et augmenter nos dépenses marketing pour rester bien positionné sur le moteur de recherche Google», souligne-t-elle.

Mère de trois ans enfants, Laure de Gennes, 44 ans, connaît des journées sans fin. «Il ne faut pas compter ses heures quand on choisit d’être entrepreneur. C’est beaucoup de sacrifices. Mais c’est aussi une aventure humaine extraordinaire. Motiver une équipe autour d’un projet constitue une grande richesse.» Selon Laure de Gennes, la principale difficulté de l’indépendant, c’est de s’arrêter ou de se réorienter le jour où cela s’avérerait nécessaire. Pourrait-elle travailler de nouveau chez Orange ou SFR? «Non, je ne pense pas. Je préférerais lancer un nouveau projet.»

Malgré ses premières réticences d’enfant, le monde de l’entrepreneuriat est devenu aujourd’hui une véritable passion pour la cofondatrice d’Eboutic, qui présidera cette année le prix Strategis-HEC 2015, décerné à une start-up innovante.
PAR GHISLAINE BLOCH

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