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Paru le 15 Septembre dans L'hebdo

Clubs privés, cash back et ventes flash, l’e-shopping innove pour séduire de nouveaux clients.

Club de vente

«Depuis leur arrivée en Suisse, les sites de vente privée séduisent de plus en plus de clients grâce à des prix très attrayants, souligne Peter Düggeli de Comparis. Ils jouent sur l’aspect affectif, le sentiment d’appartenir à un club et d’avoir ainsi accès à quelque chose d’exclusif.»

En Suisse, eboutic.ch a été le premier à se lancer, en octobre 2007, dans ce marché prom- etteur, qui ne représente encore qu’une goutte dans l’e-commerce suisse. Depuis, une poignée d’autres lui ont emboîté le pas, encore très loin de la centaine de sites de vente privée en France.

Par «vente privée», il faut comprendre un mode de vente par lequel quelques produits, en stocks limités, sont proposés avec de fortes réductions (de 20 à 80%) sur une période de temps réduite (d’un à sept jours selon les sites). Le tout moyennant une inscription, généralement gratuite, via le parrainage d’un membre déjà inscrit, d’où l’idée un rien usurpée d’exclusivité. «Il est vrai que les inscriptions sont ouvertes à tous, mais le concept est celui de club auquel on s’inscrit, indique Isabelle Campone, responsable de la communication du site My Private Boutique, lancé en novembre 2009 et qui dispose également d’une boutique outlet en ligne. Notre objectif est de limiter à l’avenir les inscriptions aux personnes parrainées.»

Les grandes marques utilisent cette méthode pour déstocker leurs collections dis- crètement, sans nuire à leur image, puisque les prix bradés ne sont pas référencés. «Les produits proposés sont souvent issus de la collection précédente, mais de plus en plus de marques nous proposent également des produits de la collection actuelle», souligne Arthur Dauchez, patron d’eboutic.ch.

eboutic.ch propose aussi du high-tech, du design et de l’aménagement, mais la pré- férence de la clientèle va, globalement, aux ventes de mode et de lingerie. La majorité des membres de ces sites sont des femmes, actives et âgées de 20 à 45 ans.

Parmi les marques les plus recherchées: les italiennes Gucci, Versace et Dolce & Gabbana, la française Lacoste ou encore les américaines Guess et Diesel. «Plus la marque est connue, plus son impact en vente privée est positif», assure Arthur Dauchez.

«Mais la clientèle raffole aussi de celles qui ne bénéficient pas d’une très grande présence en Suisse, précise David Burgener chez FashionFriends. Les produits de la marque américaine Abercrombie & Fitch, par exemple, créent à chaque fois l’émeute avec des centaines de membres connectés au lancement de l’offre et des centaines d’articles vendus en quelques minutes.»

Principaux inconvénients: celui, classique de la vente en ligne, de ne pas pouvoir voir ou toucher le produit et les délais de livraison, à la merci des marques, qui peuvent atteindre trois semaines. Pas de problème pour Corinne, mère de famille de 38 ans installée à Gen- thod (GE), inscrite à tous les sites suisses: «J’achète peu de vêtements pour moi. Je dépense principalement pour mes enfants, mon mari et la maison.»

Une chose est sûre, le marché a de l’avenir, au vu des chiffres d’affaires réalisés par les différents sites. Ainsi, lancé en été 2009, le site My-Store enregistre plus de 400 nouveaux membres par jour et revendique un chiffre d’affaires de 500 000 francs par mois. David Burgener renchérit. «En termes de chiffre d’affaires, les ventes privées ne représentent qu’une toute petite partie de l’e-commerce en Suisse. Mais ce marché grandit près de cinq fois plus vite que le marché traditionnel.»

Un jour un produit

L’iPhone 4 proposé en exclusivité avant son arrivée dans les rayons suisses. C’est le dernier coup du site QoQa, qui a fait un millier d’heureux pour une centaine de milliers de connectés. Le signe particulier de ce site créé en 2006: une seule vente à la fois, renouvelée quasiment chaque jour, sauf celle du vendredi qui dure jusqu’au dimanche soir. En vrac, la deuxième semaine de juillet, QoQa a proposé un sac à dos, une station météo, un pèse-bagage, des écouteurs et de la syrah marocaine.
«J’envisage de lancer un produit le dimanche», sourit le patron, Pascal Meyer. Qui as- sure que les rabais proposés sur son site sont «beaucoup plus importants que ceux des sites de vente privée» et attribue une grande partie de son succès au ton décalé, «proche du client», véhiculé par QoQa. «Et pas besoin d’être membre!»

L’année dernière, le site a réalisé un chiffre d’affaires entre 7 et 8 millions de francs et emploie une dizaine d’employés. «La marge de progression est encore très importante, souligne Pascal Meyer. La Suisse alémanique ne représente pour l’instant que 10% de notre chiffre d’affaires.»

Cash back

Ils s’appellent iGraal, Fabuleos, Ebuyclub ou encore Cashstore. Tous ces sites propo- sent aux internautes de leurs reverser une partie des sommes qu’ils dépensent sur le web en euros sonnants et trébuchants. Très largement utilisé aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, ce phénomène fait ses premiers pas en Europe continentale, notamment en France.

Comment ça marche? Les sites de cash back fonctionnent un peu comme les compa- rateurs de prix. Lorsqu’un internaute cherche un produit, il se voit proposer une liste de boutiques partenaires, offrant l’article en question. «En tant que fournisseur de clients, nos partenaires nous reversent une commission pour chaque client que nous leur apportons, explique Alexis de Charentenay, directeur général de Cashstore (650 000 membres). Habituellement, les comparateurs de prix encaissent l’intégralité de cette commission. Nous, nous en reversons une partie à l’acheteur, pas sous forme de points ou de miles, mais sous forme d’argent liquide que nous versons sur son compte en banque dès que la somme atteint 15 euros.»

Chaque site de cash back recense entre 400 et 1000 e-boutiques partenaires, telles que la Fnac, Cdiscount, Amazon, Yves Rocher, Pixmania ou encore Rueducommerce. Les remises moyennes sont de l’ordre de 5 à 6% du prix de l’achat hors TVA et hors frais de livraison. «Pour les cosmétiques ou le textile, cette remise peut s’élever jusqu’à 30%», se félicite Alexis de Charentenay.
Malheureusement, l’absence de sites de cash back suisses empêche les internautes helvétiques de bénéficier pleinement du système. «Avant d’acheter sur notre site, les acheteurs doivent bien vérifier que les boutiques partenaires livrent en Suisse, précise Alexis de Charentenay. Si ce n’est pas le cas, ils ne peuvent profiter de notre offre.»

Encore un effort
Les vendeurs au défi

Pour pleinement satisfaire leurs clients, les boutiques virtuelles doivent s’améliorer. Par exemple sur le droit à la rétractation. «En Suisse, la possibilité pour un client d’annuler sa commande, sans avoir à donner de raison, n’est pas inscrite dans la loi sur le commerce de détail, contrairement à ce qui se fait dans l’Union européenne, rappelle Peter Düggeli de Comparis. C’est pourquoi de nombreux sites suisses re- fusent cette possibilité aux clients.»

Sur les 120 sites d’e-commerce analysés par Comparis, la moitié n’offre pas la pos- sibilité de se rétracter. Néanmoins, sous l’influence de boutiques étrangères, les e- vendeurs adoptent de plus en plus les standards européens. «Globalement, les bou- tiques d’e-commerce répondent de mieux en mieux aux attentes des clients, tant en termes de sécurité que de convivialité, précise Peter Düggeli. Néanmoins, des améliorations sur le droit des consommateurs seraient encore les bienvenues pour de nombreux sites.»

Et 101 sites sur les 120 analysés par Comparis se chargent de la gestion du retour de produits défectueux sous garantie. Les autres laissent le client se débrouiller avec le fabricant. Un problème qui n’inquiète pas Alain Laidet, commissaire général des Salons e-commerce de Genève et de Paris: «La profession d’emarchand demeure un métier neuf, où tout reste à faire autant du côté marchand que du côté consomma- teur. Les sites évoluent très vite, en particulier au niveau de la afin de pouvoir gérer et livrer de plus en plus de commandes. Bientôt, ils géreront tous les cas de garantie et livreront tel jour à telle heure, sans retard.»

Axel Marguet, fondateur de cigares.ch, loue la qualité du service postal suisse: «Depuis notre création en septembre 2007, aucun de nos colis n’a été perdu, ni même abîmé. La Poste est un service de première qualité.» Néanmoins, certains acteurs de l’e-commerce fustigent l’absence d’une réelle concurrence face au géant jaune, qui ralentit le développement du secteur en Suisse.

Par Albertine Bourget, Bertrand Beauté

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